Le trajet se fait en silence. Après, vous connaissant, Dehlila et toi, tu ne t'attendais à rien de moins. Enfin, surtout venant de toi. Tu parles rarement et, quand tu le fais, ce n'est que pour balancer un mot ou deux, à l'arrache. La communication, ce n'est clairement pas ton fort et c'est, sans aucun doute, l'une des raisons pour lesquelles ça bloque entre Dehlila et toi. Derrière le volant de ta bagnole, tu t'autorises quand même a jeter quelques regards furtifs dans sa direction. Peut-être que de débarquer à cette fête, à l'improviste, a, en quelque sorte, bousillé sa soirée. Tu t'en tapes! Tu ne pouvais pas supporter le fait de passer la nuit à te demander où elle était et, surtout, avec qui elle était. T'as préféré te pointer là-bas, de t'assurer, par toi-même, qu'elle finirait dans ton lit. En sécurité. Ouais, parce que tu ne couches pas avec elle. Jamais. Et, pourtant, ce n'est pas l'envie qui manque. Tu coupes le contact lorsque t'arrives devant ton appart' et après t'être garé dans ton parking. Tu débarques en trombe, te dépêchant de faire le tour de la voiture pour lui ouvrir la porte. Tu n'es pas galant, loin de là, mais as-tu déjà dit que cette fille-là te rendait fou, mh? C'est en la traînant par la main que vous parvenez devant la porte de ton appart' que tu déverrouilles en laissant passer la brune en premier. Une fois à l'intérieur, tu lances tes clefs sur le comptoir de la salle à manger et tu fouines dans ton frigo. « Bière? » Tu lui demandes en levant les yeux vers elle. Tu lui offrirais bien un verre de champagne d'une bouteille hors de prix, un truc bien classe pour l'impressionner qui rendrait justice à la femme qu'elle est, mais tu n'as qu'une caisse de bière cheap que t'as chopé dans un supermarché miteux au coin de la rue.

Ouais. Court, simple, précis. Le genre de réponse que t'aimes entendre. Les "ouais, mais avec du Clamato, s'il te plait" ça t'fait chier. T'empoignes donc deux bières. Au diable le champagne! De toute manière, vous n'avez rien à fêter, même si sa tenue laisse prétendre le contraire. Lorsque tu te redresses, tu sens le bout de ses doigts t'effleurer la peau en commençant par tes épaules, tes bras jusqu'à tes mains et tu frissonnes lorsqu'elle presse son corps contre ton dos. En temps normal tu n'es pas très tactile. En fait, tu ne l'es pas du tout, sauf avec elle. Deh est un peu l'exception à toutes les règles que tu t'es toi-même instaurés. Le sexe, par exemple. Tu ne couches pas avec les filles parce que tu les aimes, non. Tu baises avec elles parce que t'es un mec et que ça t'démange. Dehlila, elle... C'est bien la seule avec qui tu n'as toujours pas couché, mais avec qui tu fais l'amour sans utiliser ta queue. Bon, elle t'a déjà tripoté la nouille quelquefois, mais sans plus. Même pas un petit baiser chaste sur les lèvres, rien. Rien qui pourrait vous faire tomber amoureux l'un de l'autre. Et pourtant... Tu soupires avant de tourner les talons pour lui faire face, collant ton front contre le siens. Les yeux fermés, tu souris aveuglement avant d'ouvrir les paupières et de lui tendre une des bouteilles, te détachant peu à peu de la brune sans pour autant cesser de la regarder. Dans un élan, tu t'autorises à t'asseoir sur le comptoir de la cuisine, débouchant ta bière pour en prendre une gorgée. T'as un brin soif, là. « T'as passé une belle soirée? » Tu lui demandes, la tête légèrement penché sur le côté alors que tu bouges machinalement tes pieds dans le vide, la bouteille maintenant entre tes cuisses.

Elle attrape la bière que tu lui tends lorsque tu te recules pour poser ton cul sur le comptoir de la cuisine et elle balance le bouchon derrière toi, directement dans l'évier. C'est pour ça que tu ne lui décapsules pas ses bouteilles, elle est très bien capable de le faire elle-même. Pas comme le trois quarts des gonzesses qui chialent après la première tentative, tss. La tête penchée sur le côté, tu lui demandes si elle a passé une belle soirée. En fait, tu te tapes un brin de sa réponse, pour être franc. T'as juste envie d'entendre sa voix. Oui et non… Elle le sera maintenant qu'on est ici. Indeed! Un sourire sincère s'empare de tes lèvres et tu le dissimules derrière la bouteille que tu portes machinalement à tes lèvres. La brune s'avance vers toi, s'installant entre tes jambes en déposant l'une de ses mains contre ta cuisse. Elle sait comment s'y prendre pour t'attendrir et, ça, ça t'fait un peu chier. Comment t'as su où j'étais? Oh. Tu pourrais lui sortir un tas d'excuses bidons comme quoi t'as des pouvoirs de clairvoyance and all. Ou que tu l'as suivis comme un putain de psychopathe digne des plus grands films d'horreurs. Que t'es un scientifique chelou qui lui a implanté une micro-puce pendant qu'elle pionçait dans ton pieu. En fait, la vérité est nettement moins intéressante. « Feeling. » Tu te contentes de répondre en haussant les épaules. Tu la connais bien. Trop bien. Par coeur, peut-être. En commençant par chaque grain de beauté qui habillent son corps jusqu'à ses pensées les plus obscures. Soulmate? M'ouais, t'y crois pas trop, mais, chose certaine, il y a une étrange connexion entre vous. Tu places une mèche de ses cheveux derrière son oreille avant de te pencher et de poser tes lèvres contre son front. « Et toi... comment t'as su qu'j'allais venir, mh? » Tu souffles contre sa peau, persuadé qu'elle t'attendait. Peut-être aussi que tu commences à prendre la grosse tête et que, au fond, elle tentait plutôt de te fuir... Mais, si c'était le cas, tu le saurais... Non?

Te retrouver là, chez toi, avec Dehlila, c'est tout ce que tu voulais quand t'as mis les pieds en dehors de ton appartement quelques heures plus tôt. T'es probablement putain de possessif envers elle et tu détestes la savoir ailleurs, avec d'autres mecs que toi. Pourtant, tu sais pertinemment que sa vie sexuelle ne se résume pas à "une petite branlette à Drew une fois de temps en temps", hein. Tu n'es pas con et elle serait stupide aussi de croire que tu ne baises pas de ton côté. Néanmoins, tu préfères ne pas y songer et tu ne lui en parles jamais. Autrement, t'aurais quelques gueules à démolir! Te l'accaparer, ça te rassure d'un sens. Au moins, quand t'es là, personne ose la toucher de ses mains souillées. Pas que les tiennes soient nécessairement propres, mais, au moins, chaque geste que tu poses sur elle sont délicats et calculés, rendant justice à ce qu'elle mérite. Comme ce baiser que tu déposes sur son front avant de lui demander comme elle a su que t'allais venir la rejoindre. En réalité, j'en savais rien. Mais j'espérais… Cette réponse suffit à t'arracher un sourire qui s'efface rapidement lorsqu'elle se recule pour planter son regard dans le tien. Tu ne bronches pas au contact de sa main contre ta joue, mais tu sens ta respiration s'accélérer lorsque son pouce effleure tes lèvres. Tu fermes les yeux lorsqu'elle s'avance vers toi, désireux d'enfin pouvoir goûter ses baisers, mais c'est sur ta mâchoire que ses lèvres se posent. Tu pousses un rire léger, un peu contrarié de t'avoir fait piéger par la brune, tout de même. Tu grognes en déposant ta bière sur le comptoir et tu te penches vers elle pour la soulever par les fesses. Tu l'installes par-dessus toi à califourchon, levant ton menton pour la contempler une demi seconde avant de l'embrasser tendrement dans le creux de son cou et descendre doucement vers son épaule.