It's not effraction. It's an appropriate urgency.
ft. Oliver

Doucement, le ciel commençait à s’assombrir. Un vent sec l’accompagnait, faisant claquer sa veste noire. Immobile devant le bâtiment d’informatique, Sybille attendait un jeune homme qu’elle n’avait vu qu’une fois. Il se nommait Oliver et il faisait partie de ses personnes qui vous donnaient envie de leur faire confiance. Du moins, c’était l’impression qu’elle avait eue. Inscrite sur tinder, elle l’avait croisée dessus et avait entamé une discussion avec lui. Résultat, l’étudiante en politique l’avait embarquée avec elle dans un plan complètement dingue. Ce dernier consistait à entrer par effraction dans la salle des ordinateurs qui se trouvaient dans ce bâtiment et de hacker le mail d’un prof pour supprimer celui qu’elle avait envoyé et le remplacer par un autre. La raison ? Elle avait envoyé un brouillon. Tous professeurs compréhensifs auraient acceptés un mail de rectification, mais pas celui-là. C’était une vraie peau de vache avec ses étudiants. Du genre aigrie et intransigeant. L’inverse du professeur apprécié des élèves. Pianotant son téléphone portable, elle vérifiait l’heure. La jeune femme avait cinq minutes d’avances. Allait-il la reconnaître ? Pour l’occasion, elle avait vêtue une tenue entièrement noire. Seuls ses cheveux roux dépassaient de son bonnet. Ce qui n’était pas très discret, mais des rousses, il y en avait à la pelle sur le campus.

A présent, le ciel était devenu presque noir. Les réverbères commençaient à s’allumer, éclairant une longue allée. Au milieu de celle-ci, une silhouette avançait à pas rapide. Petit à petit, elle se rapprochait de l’endroit où se trouvait la jeune femme. Passant près d’un lampadaire, son visage fut éclairé pendant un quart de seconde. Ainsi, elle eut l’affirmation de sa présence. Enjambant rapidement les marches, il parvenait à se hisser à sa hauteur. Comme la dernière fois, il était fidèle à ce qu’elle avait vu de sa personne. De lui, émanait un pressentiment positif. L’intuition féminine ne trompait pas et Sybille lui faisait étrange confiance. Du moins, elle sentait qu’elle pouvait. Clignant des yeux, elle s’éloignait de ses pensées, saluant son complice. « Salut, merci d’être venu. » Souriant, elle dévoilait ses dents blanches, avant de reprendre la conversation. « Les portes sont encore ouvertes. Les femmes de ménages sont encore dans le bâtiment. » Ce qu’elle ne savait pas, c’est qu’elles n’allaient pas tarder à partir et que comme d’habitude, un agent de sécurité inspecterait les lieux comme chaque soir.

Deux faveurs en peu d'temps... mais t'en as envie et ça t'fait plaisir d'lui rendre service. Aussi, ça t'fait t'dégourdir les jambes un brin, même si t'aurais pu l'faire à partir d'chez toi... Suffit d'avoir l'adresse e-mail d'la personne concernée et l'tour est joué, mais Sybille avait l'air d'insister à c'que vous vous rejoignez à l'Université. Peut-être parce qu'elle se sentait mal à l'aise d'te demander ça et qu'elle n'voulait pas qu'tu fasses le sale boulot tout seul... même si elle ne t'sera pas vraiment d'une grande aide, cela va d'soi! Du coup, t'as vite quitté l'écran d'ton portable pour mettre d'nouveaux vêtements, sans oublier d'prendre ta clef USB au passage - celle qui contient l'programme d'piratage - et t'extirper hors d'ton appart' en passant par l'Starbucks. Un café... t'en avait besoin, d'toute évidence. Même si ça n'prendra que quelques cliques et qu'tu t'retrouveras chez toi en un rien d'temps, un peu d'caféine, ça fait toujours plaisir. Tu t'rends donc au point d'rendez-vous, empruntant l'allée principale d'la cours d'Harvard. Ton chemin s'éclaire sous les lampandaires et tu décèles, au loin, une p'tite silhouette vêtue de noire à la crinière rousse. Pourquoi elle est fringuée comme ça? Vous n'allez quand même pas commettre un vol, quoi... Un sourcil arqué, tu parviens à sa hauteur, ton café bien entamé dans l'une de tes mains. Salut, merci d'être venu. Tu lui rends son sourire, oubliant presque qu'elle ressemble à un ninja. « Pas d'quoi! » tu lui réponds avant d'porter ton gobelet contre tes lèvres et d'avaler le reste du liquide d'un coup sec. Les portes sont encore ouvertes. Les femmes de ménages sont encore dans le bâtiment. OK? T'hausses les épaules, peu impressionné. Certes, c'est une infraction, mais, après tout, vous êtes tous les deux étudiants. Vous n'risquez pas grand-chose si quelqu'un vous chope dans l'bâtiment mis à part un avertissement. C'qui est plus risqué, c'est d'vous faire surprendre alors que t'es devant l'pc. Mais t'es assez habile pour faire disparaître toutes traces d'infiltration. « Hey, t'inquiètes pas, Sybille! T'es avec un professionnel, là! » tu t'moques un peu, histoire d'détendre l'atmosphère avant d'te diriger vers la première poubelle que t'aperçois pour y jeter ton gobelet vide et de t'élancer vers la porte principale...

It's not effraction. It's an appropriate urgency.
ft. Oliver

Peut-être que Sybille faisait légèrement cliché. En fait carrément. La jeune femme s’était habillé entièrement de noir et maintenant qu’Oliver lui faisait face dans ses habits d’étudiants, elle se sentait ridicule. Chose qu’elle se gardait de montrer. D’ailleurs, le jeune homme s’empressait de la rassurer, tout en laissant une pointe d’ironie s’immiscer dans sa voix. En réponse, un sourire venait habiller les lèvres de la jeune femme. « Ça j’en doute pas ! » Sybille rejoignait rapidement Oliver à l’entrée du bâtiment. Tous les deux, pénétrèrent à l’intérieur. Ils furent saisis par les bruits d’aspirateur et les conversations étouffées des femmes de ménages. A cette heure-ci, les lieux prenaient une autre allure. Aux heures de cours, l’endroit était bondé de monde, mais maintenant, il semblait être presque apaisant. Prenant les devants, elle ouvrait la marche en direction de la salle des ordinateurs. Poussant la porte de cette dernière, elle se dirigeait vers un des bureaux présent pour allumer la lampe qui s’y trouvait. L’arme du crime se trouvait en mode veille. D’une main, elle sortait le bout de papier avec l’adresse mail du professeur. « Tiens, voilà son adresse. » La rouquine donnait le post-it jaune à son interlocuteur. « T’es sûr que tu peux pas te faire choper ? » Rien qu’en prononçant ses mots, elle se maudissait presque intérieurement pour la naïveté dont elle venait de faire preuve. Bien sûr qu’il s’y connaissait. Oliver lui avait même assuré. « Loin de moi l’idée de penser le contraire, mais je m’y connais pas du tout en informatique. » Se détournant d’Oliver, elle prenait une chaise voisine pour s’assoir à côté de lui. Ça faisait deux fois qu’il venait l’aider avec un problème d’informatique. A force, il allait peut-être se dire que s’était une manière de l’utiliser. Du moins, peut-être penserait-il ça. La raison principale était bien son devoir, mais la seconde raison, c’est que son subconscient avait vu là un moyen de le revoir.

Ça j’en doute pas ! son commentaire t'arrache un sourire. tu n'es pas du genre ventard, en temps normal. en fait, c'plutôt l'inverse. t'as tendance à t'rabaisser continuellement mais, s'il y a bien un truc qu'tu maîtrises à la perfection, c'bien le hacking. t'as ça dans l'sang, faut croire. et tu dois bien admettre que t'es assez content d'sortir d'ton appart', finalement. après la soirée que t'as passé avec alice... disons seulement qu'vous vous êtes pas reparlé depuis et ça commence à t'agacer un brin. non parce que, normalement, vous n'passez pas une seule journée sans vous envoyer des sms alors que là... plusieurs jours se sont écoulés depuis vos derniers messages. et ça t'obsède. comme un putain d'psychopathe. tu penses juste à ça -et encore là, maint'nant. d'ailleurs, c'est les bruits d'aspirateur qui t'font revenir à la réalité. et sybille, aussi. tu l'aimes bien, en fait. autrement, tu n'ferais pas tout ça pour elle, quoi. tu jettes un coup d'oeil vers elle alors qu'elle prend les devants et tu t'contentes d'la suivre sans rien dire. d'toute évidence, elle sait parfaitement où aller. elle ouvre la porte d'la salle des ordinateurs et s'dirige vers un des bureaux pour allumer la lampe. tu t'installes confortablement devant l'écran en mode veille alors qu'la rouquine te tend un bout d'papier. Tiens, voilà son adresse. tu saisis le post-it, poses tes iris une demi-seconde sur les écritaux et bouges la souris pour allumer l'ordinateur. T'es sûr que tu peux pas te faire choper ? tu roules des yeux en extirpant ta clef usb d'la poche de ton jean et tu l'insères derrière la boîte du pc. Loin de moi l'idée de penser le contraire, mais je m'y connais pas du tout en informatique. tu double-cliques sur l'une des icônes qui s'trouve à l'intérieur d'ta clef alors qu'une nouvelle fenêtre s'ouvre, mettant en marche ton logiciel de piratage. tu t'retournes vers la rouquine et lui esquisses un sourire tendre, comme pour la rassurer. « sybille... c'juste une boîte mail et un devoir... on cambriole pas une banque, là! relax, assie-toi et détends-toi. » ton attention s'reporte à l'écran alors qu'ta complice s'installe sur une chaise près d'toi. habituellement, t'aimes pas trop quand on fouine par-dessus ton épaule, ça tendance à t'déconcentrer un brin. mais, là... tu t'en moques un peu. étrangement...

It's not effraction. It's an appropriate urgency.
ft. Oliver

Peut-être qu’elle l’agacerait à rester près de lui. Se retenant de se mordre les ongles comme une parfaite imbécile, elle fixait l’écran de l’ordinateur avec intensité. Oliver avait dû sentir sa nervosité comme si cette dernière était peinte en gros sur son visage. Aussi, il se tournait vers elle pour lui procurer des paroles qui se voulaient réconfortante. En croisant son regard, elle avait retenu sa respiration pendant un instant. L’étudiant semblait être tellement confiant, qu’il arrivait à l’impressionner. D’ordinaire, les harvardiens se montraient stressés ou imbu d’eux même. A l’inverse, Oliver avait de l’assurance accompagné d’une nonchalance apaisante. « D’accord » Et cela, fut les seuls mots qu’elle trouvait à dire. Tout de même désireuse de voir comment il allait procéder, la rouquine prenait une chaise et s’asseyait près de lui. L’observant, elle découvrait un homme à l’aise dans sa pratique. S’en était presque déconcertant. Il jonglait avec les pages facilement comme s’il avait fait ça des millions de fois. L’irlandaise l’avait déjà vu à l’œuvre lors de leur rencontre, mais cela avait été différent. A ce moment-là, il ne s’agissait pas de pirater le mail d’un professeur.

« J’te savais douer, mais là, tu me met carrément la honte. » disait-elle, le ton doucement ironique. Sybille était une vraie guigne avec les ordinateurs. D’ailleurs, le sien tombait toujours en panne. Elle n’avait pas les moyens de s’en racheter un. Aussi, elle préférait généralement jouer avec la batterie jusqu’à ce qu’il se rallume par miracle. Solution qui n’allait certainement pas arranger l’état de ce dernier. Après plusieurs manœuvres, Oliver réussissait à entrer dans la boite mail de son professeur. « T’as réussis ! » S’exclamant doucement, elle affichait un sourire béat. En aucun cas, elle n’avait douté de lui, mais là, c’était vraiment du concret. Elle pouvait même voir son mail. Il ne l’avait pas encore ouvert. « C’est celui-là » Du doigt, elle pointait son nom. Il fallait juste supprimer toute trace de cet envoi pour qu’elle puisse en effectuer un nouveau. « T’as l’habitude de faire ce genre de truc ? » Syb entendait par-là, s’il hacker était un passe-temps comme un autre.

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ft. Oliver

La jeune femme laissait un échapper un léger rire, après avoir compris qu’il plaisantait. « J’oserais pas voyons. » Curieuse d’en apprendre un peu plus sur lui, la  rouquine lui demandait s’il avait l’habitude de pratiquer ça. Etait-ce un passe-temps ou quelque chose de plus professionnel ? Quoi que dit comme ça, sa question pouvait paraitre légère. Haussant les épaules, il lui répondait avec nonchalance. Ce qui laissait comprendre qu’il ne voulait pas s’épancher sur le sujet. Autrement dit, elle n’en saurait pas davantage. Chose qu’elle pouvait comprendre, le hacking était illégal. Même si des personnes excellaient dans ce milieu. Les yeux rivés sur l’écran, il pianote avec adresse et en quelques clics, son mail se retrouve supprimé. En quelques minutes, il avait régler son problème. D’un clin d’œil, Oliver lui annonçait la fin des travaux. « Super » C’était là, sa façon de le remercier. Puis, sortant la clé usb qui contenait son devoir, de son sac, elle ajoutait : « J’en ai pour quelques secondes. » A son tour, elle prenait possession du poste pour envoyer rapidement son devoir, avant que son professeur se connecte. Une fois cette tâche accomplie, elle imitait le jeune homme en rangeant sa clé. Posant ses pupilles vertes sur lui, Sybille se demandait comment elle pouvait le remercier. En l’espace de quelques jours, il l’avait sortie de deux galères informatique. Seulement accepterait-il ? Il n’avait même pas demandé d’argent en échange.

Surprise, elle refreinait un bon causé par l’arrêt des aspirateurs. Elle s’était facilement acclimater à ce bruit, alors se retrouver brusquement dans le silence, lui était presque étrangère. Reportant son attention sur Oliver, elle laissait cette fameuse question sortir de sa bouche. « Si t’as le temps, je pourrais te remercier en allant boire un café ? Je connais un café secret dans le coin qui fait de la poésie. Bon je reconnais que leurs poètes sont franchement dérangée, mais le café est bon. » Maladroite comme toujours. Sybille n’était pas adroite quand il s’agissait de parlementer avec quelqu’un. Elle s’enflammait vite et parfois, il lui arrivait de manquer de tact. Sauf quand il s’agissait de politique. Là, c’était simple. Détournant son regard en attendant une réponse, elle se relevait tout en arrangeant son sac sur le côté.

It's not effraction. It's an appropriate urgency.
ft. Oliver

Naturellement, elle lui avait proposé d’aller boire une boisson chaude dans un café secret qui était en majeur partie connu par la communauté jeune de Boston. Après tout, elle pouvait le remercier de cette manière. Puis, la jeune femme appréciait sa compagnie. Sybille ne le connaissait que superficiellement, mais elle était curieuse d’en apprendre plus à son sujet. A l’écoute de sa question, Oliver avait posé ses yeux sur elle, tout en haussant les sourcils. Détail qui ne lui avait pas échappé. Pensait-il qu’elle se sentait obligé ? A sa réponse, la rouquine allait rétorquer qu’elle ne se sentait pas obligé, mais le hacker la prenait de cours en lui donnant une réponse positive. « J’savais que tu ne serais pas assez fou pour dire non au café » répondait-elle sur un ton plaisantin. Prenant les devants, il allait ouvrir la porte pour la laisser passer. « Merci » Un léger sourire venait flotter sur ses lèvres, alors qu’elle le remerciait pour sa galanterie. Passant les doubles portes du bâtiment, ils furent assaillis par une bouffée d’air frais. Le soir, il faisait nettement plus frais que la journée. Cela ne la dérangeait pas outre mesure, mais elle avait hâte, de retrouver un temps plus doux. Resserrant sa veste noire autours d’elle, la jeune femme prenait les devants pour descendre les escaliers. « C’est pas très loin d’ici. » Ce café avait la réputation de se retrouver dans le sous-sol d’un bâtiment ancien. Il suffisait de descendre des petits escaliers en fer forgé pour arriver devant une porte empli d’affiche relatant les divers événements qui avait lieu à l’intérieur.

Pour y arriver, ils ne mirent pas plus d’une dizaine de minutes. Ouvrant la marche, Sybille descendait les escaliers, avant de pousser la porte. « Je t’avertis, tu risques faire la rencontre de spécimens bizarre, mais promis, ils ne mordent pas. » disait-elle avec ironie. Très vite, ils furent assaillis par la chaleur qui émanait des lieux. L’endroit sentait le café et les bonnes pâtisseries. Au fond, une petite estrade avait été installée, dessus, des poètes en herbe faisaient l’élocution de leur dernier chef d’œuvre à tour de rôle. S’installant sur une table assez éloignée de la petite foule, elle se débarrassait de son manteau pour dévoiler un pull couleur bordeaux. « Tu l’aime comment ton café ? » Sybille n’avait pas pour habitude d’amener des personnes dans cet endroit. La plupart du temps, elle y allait seule pour étudier quelques schéma tout en s’offrant une pose en écoutant des poètes dérangés. Alors, emmener Oliver ici était une première. Peut-être qu’il allait la prendre pour une fille bizarre. Qui sait.